Chantal Jouanno dérange les caciques de l’UMP

Décidément, il ne fait pas bon adopter une liberté de ton dans l’entre-deux-tours. Chantal Jouanno vient d’en faire l’amère expérience pour la deuxième fois l’espace de dix jours seulement. Le 17 avril dernier, elle avait lancé le message suivant depuis son compte Twitter : « Après Amara et Hirsch, j’ai aussi des raisons personnelles d’être contre NSarkozy, mais je voterai pour lui car il est le seul à oser affronter les problèmes de la France, sans démagogie, sans renoncer. Et moi, je le dis sans demander, ni quémander de postes… ». L’attaque (en était-ce vraiment une d’ailleurs ?!) n’avait rien de violente mais elle a pourtant déchaîné les passions dans sa propre famille politique et elle avait dû se justifier par voie de presse interposée. Depuis mardi, elle est à nouveau sous le feu des critiques pour des propos jugés inadmissibles par l’UMP, qui n’ont pourtant rien d’extraordinaire.

Dans le Point de mardi dernier, Elle a tenu à prendre ses distances avec la droitisation du discours de son chef et a clairement annoncé qu’en cas de duel entre le FN et le PS aux législatives, elle voterait pour ce dernier. Elle a aussi rappelé que les « questions d’immigration, de laïcité, de sécurité (étaient) importantes » mais qu’elles ne représentaient « pas les préoccupations majeures de nos concitoyens ». Elle affirmait haut et fort que les valeurs du FN n’étaient pas les siennes. Trop fort visiblement. Charles Beigbeder, candidat UMP pour les législatives dans les XIIe et XXe arrondissements de Paris, a été le premier à réagir : « Il y a une vraie dynamique qui porte Nicolas Sarkozy, je trouve indécent et irresponsable de la part de Mme Jouanno d’évoquer les législatives avec un scénario catastrophe » estimant même que la sénatrice «dépassait les bornes ». Il lui a même conseillé de prendre sa carte du parti : « Plutôt qu’enchaîner les déclarations équivoques, elle qui doit tout à M. Sarkozy devrait prendre sans plus attendre la carte du PS ». La deuxième salve n’a pas tardé, en provenance du leader des députés UMP, Christian Jacob : « Ça ne nous sert absolument pas. Dire que le problème de l’immigration n’existe pas quand on fait son marché dans le VIe arrondissement, c’est facile!». Il faisait là allusion aux propos de Chantal Jouanno qui avait dit ne pas rencontrer ce type de questions de ses électeurs quand elle faisait son marché. On pourrait objecter au Ministre qu’au moins elle le fait elle. Pas sûr que ce dernier daigne sortir de ses beaux-appartements autrement que pour y faire sa soupe électorale. Et comme si cela ne suffisait toujours pas, le premier ministre lui-même y est allé de son petit commentaire : « Ces propos de Chantal Jouanno sont stupides et contre-productifs. Il faut refuser de se placer dans une hypothèse de défaite et refuser toute question sur l’après ». Notons ici la clairvoyance d’un vrai chef d’équipe qui donne comme conseil de ne surtout pas se projeter et de n’envisager qu’un seul scénario. Naïvement, j’aurais précisément cru le contraire…

Ces sorties sont d’autant plus surprenantes que les propos de la sénatrice n’ont vraiment rien de choquant. D’ailleurs, le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, n’avait pas d’autre commentaire un peu plus tôt en assurant, sur les ondes de RTL, qu’il ne voterait «pas pour le Front national» en cas de duel entre le FN et le PS aux législatives. François Fillon n’avait rien eu à redire avant de tomber à bras raccourcis sur Chantal Jouanno un peu plus tard. Alors doit-on y voir du simple machisme ou le début de la campagne municipale du XIIème arrondissement où Chantal Jouanno et Charles Beigbeder seront opposés ? Sans doute un peu des deux.

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