Vive le sport … et le dopage!

Contador condamné

La nouvelle salutaire est tombée dans le milieu de l’après-midi : Alberto Contador est suspendu deux ans et déchu de sa victoire dans le Tour de France. Enfin, aurais-je envie d’ajouter ! Rappelons rapidement l’affaire : en 2010, au cours d’un Tour de France épique, Alberto Contador prend le dessus sur ce qui deviendra son plus grand rival, Andy Schleck. Sauf qu’en plein Tour de France, il est déclaré positif au clenbutérol. Le champion ne conteste pas ses taux hors norme mais plaide pour sa défense que le produit illicite proviendrait d’une contamination alimentaire. Sa fédération l’avait blanchie en février 2011 mais le tribunal arbitral du sport (qui est au-dessus des fédérations) vient d’en décider autrement. Alberto Contador est ainsi suspendu jusqu’au 6 août 2012.

Souvenirs des années 1990-2000

Dès 2000, j’avais eu l’occasion de regarder un reportage édifiant sur la cinquième chaîne sur le dopage. On y montrait que les performances ne cessaient d’augmenter et que le professionnalisme ainsi que l’entraînement n’expliquaient pas tout. On évoquait sans détours les cas avérés de dopage sur le tour dès le milieu du précédent siècle avec quelques cas étranges de morts dont un sur les routes mêmes du tour (Tom Simpson en 1967). Ce reportage indiquait qu’alors que l’espérance de vie à la naissance explosait tout au long du siècle, celle des cyclistes stagnait voire diminuait même ; plutôt étrange non ? Il évoquait un autre sujet tabou, celui des enfants handicapés des sportifs et notamment des cyclistes. Le cynisme était même poussé à l’extrême de l’autre côté de l’Atlantique puisque des clubs de football américain portaient plainte contre leurs joueurs. Ces derniers avaient eu le seul tort de refuser le dopage pour se conformer à l’instruction de leur club en prenant 30 kilogrammes de musculature en un temps record pour changer de poste. Le mot sport était banni et on parlait alors de spectacle. En conclusion, le documentaire insistait sur le rôle de l’argent qui avait perverti l’esprit même du sport et donnait la parole à Marcel Desailly. Ce dernier – jamais avare de paroles censées – nous expliquait gentiment qu’il n’était pas assez payé eu égard au spectacle qu’il livrait parfois deux soirs par semaine et qu’il faisait plus du show que du sport…

 

Ce reportage télédiffusé avait fait l’effet d’un électrochoc pour mon corps déjà bien secoué par l’affaire Festina deux ans plus tôt. On y apprenait ce dont tout le monde se doutait : il y avait du dopage à grande échelle avec environ du 1/4 au 1/3 des revenus de l’équipe finançait et entretenait le dopage. En 1997 et en 1998, mêmes les coureurs n’en pouvaient plus, parlant entre eux du rythme insensé donné par l’équipe Festina. Tout le monde retiendra le fameux « à l’insu de mon plein gré » prononcé par Richard Virenque qui fut le seul à nier parmi les neuf équipiers qui écopèrent tous de six mois de suspension, c’est-à-dire rien par rapport à l’infraction. Deux ans plus tard et après une bataille judiciaire, Virenque finira par avouer – nous n’avions de toute façon nulle doute sur sa culpabilité vu qu’il était défendu par Maître Collard ! – et purgera seulement huit mois de suspension ce dont il se plaidera un peu partout parlant d’iniquité de traitement par rapport à ses partenaires n’ayant écopé que de six mois. Un peu plus tard, il se fera remarquer sur le plateau de Thierry Ardisson, dans l’émission Tout le monde en parle. L’animateur, ayant baissé la lumière et mis le cycliste ou dopé – au choix – sous le feu des projecteurs lui posera la question qui tue :

– Richard Virenque, si vous aviez la possibilité de gagner le Tour de France en étant dopé et certain de ne pas être attrapé, le feriez-vous ?

– Sûr ? C’est sûr que je ne me ferais pas prendre ? commença Richard, malin comme un singe.

– Certain, lui répondit Ardisson.

– Ah bah oui alors, dit sans hésiter notre grand champion, nous livrant une fois de plus l’immensité de son grand talent.

Une longue liste

La liste des cyclistes suspectés est longue : de Mercx au Blaireau, en passant par Laurent Fignon (qui a, au passage, beaucoup appris de Hinault puisqu’ils étaient dans la même équipe aux débuts de Fignon), Ulrich, Bjarne Riis, Erik Zabel, Abdoujparov, Pantani, Floyd Landis, Rasmussen, Vinokourov, Lance Armonstong, Alberto Contador… et bien sûr non exhaustive. Quel est le point commun de tous ces sportifs ? Très simple, tous, sans exception, se sont longuement répandus dans la presse pour nier tout dopage, répétant inlassablement les mêmes refrains. Le bilan : Fignon, Risse, Zabel, Abdojaparov, Pantani, Landis, Rasmussen, Vinokourov, Contador, Risse ont officillement reconnu le dopage et Fignon ainsi que Pantani en sont même morts. Ulrich est dans l’attente d’une décision du TAS pour plusieurs affaires et n’a pu été pris que pour usage d’amphétamines suite à un accident de voiture où il s’en sorti en avouant avoir ingurgité de l’ecstasy…  Hinault se porte bien ainsi que Merckx et prendront évidemment la défense du pauvre Contador. Quant à Lance Armstrong, il connaît tout juste une accalmie judiciaire mais n’est pas encore sorti d’affaire.

 

Alors certes, Contador a peut être bien été contaminé par un aliment (aucun athlète aux JO de Pékin n’a mangé local pour éviter ce problème vu qu’on estime qu’1/10ème de la nourriture est contaminé en Chine) mais on peut nourrir plus que de gros doutes. Pendant qu’elle était Ministre, Marie-George Buffet, avait tenté de mettre sous scellés tous les échantillons d’urine prélevés lors d’un Tour de France. L’UCI avait alors envoyé des gros bras pour tout récupérer et tout détruire, ce qu’avait raconté Le Canard Enchaîné, avec un argument imparable : cela ne sert à rien à cause de la prescription au-delà d’un certain temps. La volonté de la Ministre était pourtant salutaire : mettre sous scellés pendant 10 ans tous les échantillons et les examiner à nouveau à la faveur des progrès des scientifiques. Gageons que le résultat aurait été très drôle ! Le Canard Enchaîné remarquait malicieusement qu’en l’an 2000, 46% des coureurs avaient ingéré un produit dopant mais sous ordonnance médicale. Cette année-là, ils avaient « explosé » la moyenne du tour. Les journalistes avaient ajouté malicieusement qu’ils auraient aimé voir le résultat si tous ces coureurs avaient été en pleine forme. Je ne possède pas les statistiques de ces dernières années mais je pense qu’ils ont dû battre le record à de nombreuses reprises. Et des cas amusants, il en existe plein d’autres.  Prenons par exemple le cas d’un sprinteur qui ne finissait pas le tour ou alors de justesse (après la terrible montagne) et qui devint meilleur grimpeur. Il paraît alors peu étonnant qu’il devienne par la suite porte-parole des coureurs et s’insurge contre les perquisitions et les suspicions de dopage portant sur les coureurs. C’est le chouchou des Français donc je tairai son nom mais il paraît que c’est un certain L.J.

Le mot de la fin

Que faire? Sanctionner doublement avec une suspension et une amende record à mon avis (un dossier est en cours concernant Contador sur une amende d’un montant de plus de 2 millions d’euros). Toute tentative passée a échoué car personne n’a respecté les règles. Citons par exemple Vino qui s’était engagé par écrit auprès de l’UCI à verser deux ans de salaire s’il était reconnu positif. Or, au profit d’un imbroglio sur les termes exacts du contrat passé avec l’UCI, il n’a jamais versé un centime d’euro puisqu’il plaidait non coupable mais a tout de même été suspendu deux ans. A sa décharge, les instances du cyclisme ne semblent pas particulièrement pressées de faire la chasse aux tricheurs. Je me souviens qu’au collège, un professeur de ma classe sans aucune autorité nous laissait allégrement copier les uns sur les autres en faisant mine de ne rien voir alors que cette même scène aurait été impensable avec tout autre professeur. Et c’est l’UCI qui joue le rôle du professeur aveugle de nos jours. Mais à quoi bon lutter? Les téléspectateurs se tiennent toujours au rendez-vous et les spectateurs se massent sur les routes pour suivre les exploits toujours plus hallucinants des sportifs-drogués. La question est de savoir ce que nous voulons: un tour amputé de son tiers avec deux jours de repos et des étapes moins longues ou un tour plus spectaculaire avec des moyennes par étape de 46 km/h? Cela rejoint le reportage d’il y a déjà 12 ans: sport ou spectacle? En suivant massivement le Tour de France, nous avons cautionné la cause du spectacle et donc du dopage.

Ajoutons, pour l’anecdote, qu’officiellement, le sport connaissant le plus de cas de dopage n’est autre que le…handball; la moitié des contrôles positifs décelant du cannabis. Je finirais ce long billet par la conclusion d’un de mes amis, pris en flagrant délit sur France 2 devant une étape du Tour de France:

– Mais pourquoi tu continues de regarder ce sport de dopés ? glissai-je, indigné.

– Ben parce que s’ils sont tous dopés, le meilleur est quand le même le meilleur ! me répondit-il le plus simplement du monde.

Imparable. C’était le mot de la fin.

 

PS : Ayant rédigé l’essentiel de ce billet de mémoire, je compte sur vous pour pointer les erreurs. Merci d’avance.

2 thoughts on “Vive le sport … et le dopage!

  1. Jack1010 says:

    et le truc fantastique, c’est que sa suspension finit en juillet 2012 ….. Donc en fait il va pouvoir se reposer un peux avant de repartir. Il rate juste le Tour de France de cette année……. quelle honte !!!!!!!

  2. admin says:

    Et les JO de 2012 aussi quand même. Mais bon, c’est vrai qu’il va pouvoir se reposer. D’ailleurs, il avait dit que s’il était condamné il stopperait sa carrière alors que là il prétend désormais le contraire. Contador qui ment, surprenant non?!

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